La rue

Aux peuples de Tunisie et d’Égypte, en marche pour la liberté du monde

 

Voilà les anonymes parmi les dieux,

Voilà le commencement extrême du courage

La rue dans sa clameur, exige

Face à l’incommensurable d’un monde qui n’offre rien d’autre que des limites

La rue en marche, dans l’exigence d’aller plus loin

D’aller plus loin que la mémoire

Avec le désir incandescent des bâtisseurs de pyramides

Avec l’élan du fleuve et des terres vives qu’il fertilise

En ces parages de liberté, les crues qu’aucun décret n’interdit

La rue, telle le fleuve, grossie de l’orage des colères

La rue, clarté nouvelle des origines, emporte comme le fleuve se dérobe

Sans escale possible pour les pouvoirs arrimés

La rue proclame dans la matière secrète du monde,

avec la conscience aiguë de l’émeute éphémère,

l’appartenance radicale à la justice et à la liberté.

Elle n’en finit pas de rassembler les fragments épars du monde,

la quête inlassable de vérité historique

la rue, archéologue des résistances et des visions d’avenir

Effervescente, de sa naissance nouvelle

Effervescente d’éternité reconquise

Aux visages que n’épuise aucune image

La rue s’affranchit

Beauté sauvage des foules denses et leurs danses

A ce moment de nudité parfaite

Éclaire

A ce moment grinçant

Où le monde retient son souffle

La terre frémit de chaque avancée, recueille à la source vive

La naissance conjuguée des êtres

Creuse encore les corps et la mémoire des résistances

Appelle le reste des flammes du feu ancien

Habite le pays de fierté

Habille les humains de dignité

Dans la succession des instants recomposés, nous appelle la perspective rehaussée de lumière, le sommet d’étoiles qu’impatientent les pierres.

Il y a ce rapport dialectique entre l’homme et le monde

Ce mouvement que rien n’achève, pas même le conflit

Cet arrachement source de la parole

L’inachevé où la rue puise inspiration sans jamais dévoiler la magie qui la meut

La rue ne se réduit pas à franchir la distance qui la sépare de l’immédiate rupture

Elle se nourrit de la compréhension de sa marche

Elle est la marche même en son irréductible désir de vie

Elle s’ouvre présente, garante des possibles, garante des étonnements nouveaux, garante profonde et humble de sa conquête

A la nuit montante, le souvenir millénaire d’exister, l’essor ébloui de la quête sorti des fleuves souterrains et de la géographie secrète de ses sources.

La rue ramène l’essentiel,.

Le bleu sans fin des révoltes, la fusion soudaine des déchirements

Le flamme prolongée que nul vent ne déporte

 

                                                                 Nicole Barrière 12/02/2011

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