Pour Geneviève Clancy
Pour Geneviève, en cette nuit où manque la voix.
Soleil
peuple au vent
l'arbre toujours garde
l'étoile
sans hâte,jaillit la nuit
sans crépuscule
l'éblouissement d'Elle.
Au milieu du ciel, un chemin entre les épaisseurs du funeste
un oiseau entre les branches qui grignotent les heures de lumière
une présence
un chant
un regard
un corps de lumière
solaire
couleur ocre
ou roche
je ne sais plus
la couleur du nuage
ou du rapide
où l'invisible transfigure
le monde entre les présences
les transparences
les reflets d'effacement de l'autre
entre les couloirs de la lumière de l'automne
le lierre assiège la muraille
couleur sel
de mer
de roche
d'oiseau
peut-être
à midi revêtu par le désir nu
au travers du rêve de tes yeux
au travers de l'espoir de ta vie
toute la nuit
un arbre creuse ses racines d'eau,
des fragments un à un se brisent
dans les couloirs sans fin de la mémoire,
portes ouvertes pourrissent tous les étés,
tout au fond du jardin
ton visage évanoui des sourires d'il y a tant d'années
ta main sur ton front qu'effrite
un visage d'éclair et d'orage
dans un jardin d'obscurités,
j'écris en tête à tête
il n'y a personne,
tombe du jour,
tombe de l'année,
tombe de l'instant,
tombe du fond,
de l'invisible chemin
marche des instants
marche des pensées
marche de la quête
un instant, date vive
l'oiseau, dès cinq heures du soir
sur les murs de brique rouge à l'heure des grappes mûres
à l'heure des jeunes filles qui s'éparpillent
comme l'automne habillé d'espace
dorée et transparente,
couleur de lumière,
dans les environs de la nuit,
j'ai entrevu une jeune fille perchée
dans les prés verts de la pluie,
l'innombrable visage adolescent
j'ai oublié son nom,
les visages et aucun ne sait que c'est plus que lui,
les heures et aucune ne sait que c'est plus qu'elle
les nuages et aucun ne sait que c'est plus que lui
les armes et aucune ne sait que c'est plus qu'elle
les arbres et tous les oiseaux savent
que la coupe de bois
que le lierre qui enveloppe
que l'âme qui résiste
que l'écriture qui flambe
que la roche qui crevasse
que la graine qui garde les peines immortelles,
que la bergère qui garde la vallée des morts
que la flûte du temps, raison de vie,
que la fleur des résurrections,
Que l'éclair, ou le jasmin
que la plaie, ou la rose pour le fusillé
ou l'échafaud, ou la grenade,
des visage dévorés de flamme,
le visage adolescent de l'amour
persécuté
dans la même cour,
derrière le même mur,
le seul visage
le seul nom
des esseulés
les yeux fermés vers les rapides du futur
rien cette nuit, contre ce rêve
rien de ce rêve arraché au rien
soulevé de rêve à rêve
tandis que le vent jette dehors l'âme
cogne aux volets l'heure injuste
tandis que les vies, leurs odeurs de vécu
leurs noms, saveurs aveugles de la nuit
lentement s'embrument de leurs horreurs vides
tandis l'éventail du temps referme ses images
la mort ouvre son bâillement lugubre
masqué
vivace comme le lierre
en racines, à l'intérieur du temps,
de vivre
temps qui se retire en une marée
se jette furieusement contre l'instant d'après
s'évanouit face au soir de pierre
armée de l'écriture indéchiffrable
sur la peau et dans les plaies
sur les flammes et dans tes yeux
et dans la bouche son goût de cendres
un goût de temps condamné
les yeux de l'esseulé passage
toujours aveugle, toujours obstiné
jusqu'au surgi, figé, écorché, condamné
comme l'arme qui creuse les paroles et dépeuplent les souvenirs,
les amis ravagés par le soleil dans une fosse
une large plaie humaine que personne ne fouille
présence sans pensée,
sans reflet transpersé de clarté
j'ai vu son atroce faille
à l'aube, tu dormais enroulé dans le drap
comme un oiseau tu as crié
comme un oiseau, tombait de la branche,
ton cri
et à la fin les vieilles photos de cendres au trou noir
entre tes yeux d'enfant d'il y a mille ans,
entre tes yeux d'enfant d'aujourd'hui
regard enfant depuis le début du temps
de la mère,de la fille solitaire
regards depuis le fond de la vie
dans ces yeux
revenir, rêver une autre vie, d'autres rivages,
en cet instant, aucun ne sait que c'est plus que lui
en cet instant aucun ne sait
les étés à venir.
Nicole Barrière
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